L’alchimie comme processus de transformation individuelle et collective
Comprendre la complexité au travers du processus alchimique
A partir du podcast[1] Out of the Box réalisé par France Musche, réécrit et amendé le 20 juin 2024
J’ai repris et amendé l’entretien initial issu du podcast.
Introduction
France : Et si l'on s'inspirait de la voie alchimique pour changer nos paradigmes intérieurs et celui de nos collectifs ? Pour faire face à la complexité que nous traversons et pour sortir de nos schémas mortifères, Christine Marsan, psycho-sociologue de formation, coach, consultante et experte en coopération, facilite les transformations individuelles et collectives. Elle favorise les coopérations organisationnelles pour réussir les transformations sociétales. Elle est aussi écrivaine et essayiste et a publié 20 ouvrages, dont quelques collectifs comme S'approprier les clés de la mutation et l'intelligence collective, co-créons en conscience le monde de demain[1].
Elle nous livre sa vision de la complexité et comment y répondre, notamment au travers du processus alchimique et de notre connexion au vivant. Nous verrons en quoi l'élévation des consciences individuelles est indispensable pour transformer un collectif. Car bien sûr, implémenter de nouvelles façons de travailler ne suffit pas à changer le paradigme d'une entreprise. Une transformation ne marche pas si un nouvel état d'être n'émerge pas. Et puis nous parlerons coopération et nous verrons quelles sont les conditions à réunir pour la faire advenir.
Débutons par le sujet de la transformation des organisations. Est-ce que tu peux nous éclairer sur qu'est-ce que c'est que cette complexité ? Comment la comprendre pour être en capacité d'y répondre ?
La complexité de notre monde contemporain
Christine : Je vais en donner une compréhension et tirer un fil qui a le plus de sens pour moi.
Nous sommes contemporains d'une complexité que nous n’avons pas forcément co-créée mais nous vivons ce temps-là de notre humanité. Nous pouvons saisir cette complexité grâce à la mondialisation et à Internet. Nous sommes 8 milliards d'êtres humains inter-connectés, directement ou indirectement, par les réseaux sociaux, les smartphones et Internet.
Nous comprenons notre interconnexion grâce aux interactions systémiques, que l'on appelle des boucles de rétroaction. C'est-à-dire que lorsqu’une personne envoie une information, il va se passer une réaction, ou pas, une réponse, un SMS, un like, une émoji, etc. La stimulation produit un effet qui revient dans le système global dans lequel vit l’individu, c’est flagrant avec les fake news et plus tristement avec le cyber harcèlement.
Toutefois, ces réactions ne sont pas linéaires. Ce n'est pas parce qu'on fait quelque chose ou que l’on poste une information qu’il y a automatiquement du buzz.
J’en reviens à la complexité elle-même. Nous en sommes contemporains et pour la grande majorité d'entre nous, nous ne sommes pas forcément en capacité de la gérer.
Comme cela représente nos conditions d’existence, dit autrement, c'est notre réalité, comment s'y prendre pour composer avec elle ? Car souvent c’est l’impuissance qui s’installe.
Mon postulat c'est que dès que nous prenons conscience de cette complexité, nous recherchons des clés de compréhension puis des clés méthodologiques pour agir avec elle. Comprendre permet d’obtenir une nouvelle cartographie du monde et l’on se sent moins perdu. C’est la situation de rupture d’avec le connu qui conduit beaucoup de gens en dépression, en burn-out, etc. Cela va trop vite, il y a trop d’informations à gérer, de choses à apprendre. Le « trop » nous sature cognitivement et émotionnellement.
Pour le référentiel des conditions d’existence, c’est par ici :
Tandis que si nous prenons un peu de hauteur alors nous saisissons les choses/informations qui sont un peu éparses et nous parvenons à une vision plus globale de ce qui est en train de se passer. Cela rassure parce que l'on comprend.
Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres. Antonio Gramsci
Qu’est-ce que j’entends par « ces choses éparses » ? Lorsque les repères de ce qui fait notre civilisation sont bousculés, tous ensemble. C’est alors un changement de paradigme. Terme issus de la physique[1], qui désigne un corpus de valeurs et de normes qui définissent la base cohérente d’une représentation homogène du monde qui tient le corps social en harmonie, car partageant des structures communes.
Nous vivons un moment où les composantes du paradigme dominant se délitent et celles qui définissent le modèle émergent sont en jachère[2]. Et dans l’intervalle, comme le disait Gramsci les monstres apparaissent. Nous vivons ce moment singulier, que je nomme inter-paradigmatique, et nous expérimentons de très forts changements. Les modèles se fracassent les uns contre les autres.
Voir à ce sujet le Choc des ombres :
Nous nous appuyons encore sur le modèle moderne construit sur la science qui apporte la promesse du progrès et du bonheur pour tous. Ce paradigme s’est construit sur les découvertes de la Renaissance puis les rationalisations du siècle des Lumières. Ces progrès apportant l’élévation sociale étaient réjouissants, voire euphorisants et mobilisèrent chacun vers la course à la croissance. L’écho dans la société fut fort, chacun voulait améliorer ses conditions de vie et vivre moins de pénibilité. Ce qui depuis a été exacerbé par la société de consommation du XXeme siècle. Dans tout paradigme il y a une phase émergente, un palier de maturité, puis une étape de déclin.
Nous avons franchi un point de bascule lorsque nous avons utilisé les ressources de la Terre sans tenir compte de ses limites. Nous sommes passés en mode prédation. Cette exploitation excessive s’explique par le fait que nous nous sommes coupés de la nature.
Au siècle des Lumières, les philosophes ont eu besoin d'émanciper l’être humain de sa dépendance à la religion, à la nature. C’est l’avènement du célèbre : « Je pense dont je suis » de Descartes. Et ce qui fit dire plus tard à Nietzsche son fameux « Dieu est mort ». Nous avons eu besoin de contrôler la nature pour déployer la science, rappelons-nous le sort de Galilée. Ce faisant, nous ne pouvions plus, nous reconnaître dans la dépendance à la nature. Dissociés de cette filiation religieuse et de l’ancrage naturel, nous avons également revisité la condition humaine et repoussé les limites aussi bien de notre existence (mortalité...) que de celles de la nature. Considérée comme objet, nous puisons désormais dans ses ressources de manière infinie.
Le modèle de prédation/consommation s'est emballé, la surconsommation s'appuie sur une surutilisation des ressources naturelles qui nous met tous en danger, les humains et toute la biodiversité que nous détruisons à une vitesse vertigineuse. Nous manifestons l’Anthropocène à l’envi.
Les impacts environnementaux et climatiques, qui sont de plus en plus visibles, ont conduit à une phase intermédiaire nommée par les uns Anthropocène et par les sociologues post-modernité, c'est-à-dire ce moment où effectivement le modèle précédent, la modernité, se déconstruit, sans que le suivant n’ait encore émergé de manière stable et partagé.
Sur l’Anthropocène, je vous invite à écouter :
C’est cette phase intermédiaire de déconstruction/reconstruction de notre civilisation que je mets en parallèle avec le processus alchimique[3]. Ce que nous vivons peut être comparé à l'œuvre au noir ; nous déconstruisons nos repères, notre socle de modèle de société, et en cela nous touchons le creux de l’abysse. Il y a un parallèle à faire avec aller dans les tréfonds de la Terre pour réaliser cette œuvre au noir, aller au creux de l'humus pour fourrager dans le terreau fertile qui rendra possible la suite. Nous réalisons ensuite un tri sélectif de nos référentiels, mais nous ne sommes pas encore dans l'étape suivante et nous ne savons pas à quoi cela va ressembler. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle tant de personnes s’intéressent à l’imaginaire, c’est pour semer les graines d’un futur enviable et commun, quelque chose qui fédère et fasse sortir du chaos.
Les différentes étapes du processus alchimique
France : Peux-tu nous expliquer quelles sont ces différentes étapes de l'alchimie ?
Christine : Les trois grandes phases, les plus connues, sont l'œuvre au noir, l'œuvre au blanc et l'œuvre au rouge. L'œuvre au noir consiste à aller regarder nos ombres, à déconstruire ce qui est à transformer, à rendre visibles et conscientes les parties sombres et inappropriées à notre situation présente. Nous détruisons notre identité, égo, nous brûlons les scories de ce que nous ne voulons plus afin de nous libérer et nous réinventer. C'est une phase qui est douloureuse et c'est la raison pour laquelle je la mets en parallèle avec la post-modernité[1].
Nous avons dû donner raison à Freud quand il ne voyait dans notre culture, dans notre civilisation qu’une mince couche susceptible à tout instant d’être transpercée par les forces de destruction des bas-fonds. Stefan Zweig
C’est ce moment où tout se radicalise, où tout le monde s'oppose, où personne ne se regarde avec mansuétude et bienveillance. Tout se clive, tout régresse. Les conservatismes de tout poil ergotent et mettent à mal les instances de dialogue et les démocraties. Nous vivons cette période où nous compostons nous-mêmes, sans toute la lucidité nécessaire du fait que nous sommes acteurs de cette désintégration. Prenons l’exemple du colonialisme ou du post-colonialisme, c’est une excellente opportunité de revisiter l'histoire et de faire réparation. L’intention est une chose, la méthode retenue en est une autre. La manière dont le wokisme s’est construit sur l’élan de dé-colonialisme démontre de la manière de vouloir faire réparation d’une violence tout en créant une autre, en réponse. Ainsi, de l’intention de réparer les injustices sociales nous en sommes venus à la cancel culture. Nous collons à l’histoire et nous vivons la Loi du Talion.
Ce moment post-moderne, entre chien et loup, est cette époque où nous ne parvenons pas encore à prendre suffisamment de hauteur et de recul pour comprendre ce qui se passe de manière globale et systémique, alors nous subissons les évènements, violents.
Pourtant, nous avons la possibilité, dans ce moment singulier et pour la première fois de l’Histoire humaine de nous regarder en train d’agir. Nous pouvons prendre de la hauteur sur ce que nous faisons (grâce à l’accès illimité à toutes les informations mondiales en un seul clic). Voir et comprendre systématiquement, ce que nous faisons tout en l’analysant pour choisir nos réponses est à portée de main.
L’Histoire se répète-t-elle ou pas ? Avons-nous l’élan nécessaire pour changer ?
France : En fait, j'ai le sentiment que dans ce passage-là, l'Histoire se rejoue en fait, on n'arrive pas à changer de plan et j'entends dans ce que tu dis aussi beaucoup de dissociation, comme si en fait on sépare, on sépare toujours plus.
Christine : Pour revenir au processus alchimique, l’œuvre au noir c'est effectivement le moment où on sépare les éléments. Donc, on sépare tout. Ensuite, c'est l'œuvre au blanc, c'est-à-dire comment va-t-on épurer et réunifier les parties éparses, celles nettoyées des scories, pour créer quelque chose d'autre et de nouveau ? Ça c’est la théorie, mais nous n’y sommes pas encore. Nous pensons que nous sommes arrivés, avec tout ce que nous avons mis en œuvre pour changer et pourtant ! C’est là qu’il nous faut opérer des distinctions. L’imaginaire inspire et nourrit l’imagination[1] qui, ensuite, va se décliner en pensées, innovations et actions. Ainsi, des films tels que Demain, et depuis les diverses initiatives au service de l’imaginaire vont essayer de penser un après.
Cependant, imaginer, penser, agir sans se transformer en profondeur c'est comme si nous voulions faire le trajet entre une berge A vers une berge B sans faire tout le chemin intérieur d'alchimisation individuelle puis collective.
Aucun problème ne peut être résolu sans changer le niveau de conscience qui l’a engendré. Albert Einstein.
Ainsi, ton impression de répétition est-elle juste, car tant que nous ne réussissons pas à traverser certains seuils, l’histoire se répète jusqu’à ce que nous franchissions l’obstacle et dépassions nos ombres.
Comprendre le processus alchimique individuel avant d’aller vers le collectif
France : Juste pour être sûre de bien te suivre, on a cette première étape, donc l'œuvre au noir dont tu parles, qui consiste à revisiter ses ombres, à séparer les choses pour mieux les voir et à partir de là s'enchaîne le processus alchimique ?
Christine : Oui, parce que si nous avons cette lucidité d’observer et d’accepter ce qui est en train de se passer, cela nous apporte la visibilité sur ce que nous sommes en train de défaire, et de comprendre les processus de deuil que nous vivons, tout à fait consciemment. Nous pouvons aussi envisager des processus de réparation qui ne sont pas des réactions, puisque nous pouvoir choisir de ne plus faire exactement la même chose que ce qu'on reproche aux autres. Par exemple, vouloir faire cesser la violence que certains hommes exercent sur les femmes ou les enfants c’est formidable, nommer cela #balancetonporc manifeste d’une violence symbolique équivalente. C’est à nouveau la loi des vengeances qui s’alimente. J’avais alerté dans l’un de mes essais, Délicate Transition du risque d’un féminisme revendicatif qui risquerait de raviver le pire du masculin. Le masculinisme est alors la réponse[1] violente.
Délicate Transition : https://amzn.eu/d/9QCmNF2
On oppose tout le monde les hommes, les femmes, les Blancs, les Noirs, les hétéro et les LGBT, les jeunes, les vieux, etc. Ces oppositions s’accompagnent de radicalisme et de rejet de l’altérité. La violence apporte sa cohorte de régressions comme un refus d’obstacle face à la complexité du monde.
Traverser le mur de complexité
Nous vivons des conservatismes épouvantables parce que nous ne parvenons pas à passer ce mur de complexité et à réussir l'inclusion de nos différences. Que nous déconstruisions c'est n’est pas grave, c’est le mouvement même de l’Histoire – et du vivant -, pour autant que nous avons la capacité de voir ce que nous sommes est en train de faire. Cette vision distanciée dite aussi « méta » nous donne une autre lecture et une autre maturité sur les évènements. Nous prenons conscience de la responsabilité de nos actes de déconstruction comme de ceux d’une nouvelle élaboration.
Cette épure où l’on met tout sur la table prend une autre ampleur. Nous regardons notre matière brute, nous effectuons ce tri sélectif afin de décider, en conscience, ce que nous allons conserver, pourquoi et comment nous choisissons tels éléments et pas tels autres. Ce qui implique des dialogues féconds au sein de la société et non pas le fait de quelques-uns pour déterminer les critères de choix. Puis, on réassemble ces composantes sociales d'une autre manière pour co-créer un avenir qui tienne compte du maximum de personnes et pointer un futur commun et désirable.
France : Les questions qui se posent sont alors : en fonction de quels critères réalise-t-on ce tri sélectif ? Quels sont ces éléments extérieurs ou intérieurs à partir desquels on regarde le processus pour juger de ce qui va être le sens/l’orientation ?
Christine : A titre individuel, c'est un petit peu plus facile à comprendre. On pourrait imaginer que nous sommes inspirés par plus grand que nous que certains vont nommer la Source ou autrement selon les croyances. Partons du principe qu'il existe quelque chose qui nous élève et nous transcende et nous fait adopter un regard plus global qui nous permet de comprendre que nous faisons partie du vivant. Nombreux sont les auteurs, biologistes, philosophes, qui nous ramènent au vivant, à cette interdépendance avec tous les règnes. Nous sommes un petit morceau du vivant, nous sommes ainsi interconnectés aussi bien horizontalement avec tous les règnes que verticalement avec la Source. Évitons le débat spiritualité/religion/laïcité. Prenons juste le parti pris du fait que nous sommes le fruit de quelque chose de plus grand qui nous permet justement d'avoir une vision globale. C'est ce que Car G. Jung avait très bien résumé lorsqu’il parlait du Soi avec un grand S, c'est-à-dire une partie de nous reliée la Source, autrement nommée daïmon[1], c’est-à-dire le guide intérieur selon Socrate. L’accès à cette partie, le Soi, est le fruit du processus alchimique psychologique et spirituel dans lequel nous nous détachons des constructions de l’ego pour faire advenir la lumière, c’est-à-dire l’inspiration depuis plus grand que notre simple volonté.
Ce n'est pas en regardant la lumière qu'on devient lumineux, mais en plongeant dans son obscurité. Mais ce travail est souvent désagréable, donc impopulaire. Carl Gustav Jung
Ainsi, afin de savoir quels seraient les éléments épurés que nous pourrions choisir pour construire l'après, encore faudrait-il que j'accepte, à titre individuel, de parcourir le processus alchimique dans lequel je lâche mon ego et je retrouve le cœur, l'essence du Soi. Je me laisse guider par la Source et à partir de ce moment-là je fonctionne à un autre niveau de moi. Comme un millefeuille je découvre plusieurs composantes en moi, mon corps, mes émotions, ma pensée et le Soi. Et toutes ensemble elles apportent un sens plus grand qui va me permettre d'avoir un autre rapport au monde. Ces multiples niveaux se comprennent de par, désormais, les connexions reconnues que nous avons avec les arbres, les animaux, plus largement avec tous les règnes. Ce qui signifie que nous disposons d’un accès à quelque chose de subtil et d'invisible. Nous prenons conscience de nos réceptivités dont nous nous étions coupés.
Ces réceptivités-là nous font entrer dans le monde du « et » c'est-à-dire que nous nous rendons compte que nous pouvons être à la fois un sujet connecté à d'autres personnes et aussi connecté à d'autres facettes du vivant. Ça c'est pour l'individu.
La Théorie U comme modèle éclairant
France : Je voudrais peut-être revenir sur le « bas », parce qu'en t'écoutant je sens qu'on est vraiment dans une descente en fait un peu comme un U et ça me fait d'ailleurs penser à cette théorie bien connue enfin en tout cas des coachs, la Théorie U. Dans le bas du U, dans cette profondeur dont tu parles il est question de faire un tri. Donc, tu dis que nous avons la capacité de le faire en conscience, l'idée c'est vraiment de se connecter à la Source et à quelque chose de plus grand que soi. Et j'entends aussi, je me permets de reformuler quelque chose « il y a aussi quelque chose à laisser, à lâcher ». Est-ce que c'est juste de dire les choses comme ça ?
Christine : Tout à fait. Ce qui est remarquable c’est de voir le nombre de modèles qui ont la même dynamique et des formes analogues, la courbe du deuil d’Elisabeth Kubler-Ross, le processus alchimique qui s’effectue dans un creuset (alchimie opérative) et fait descendre dans les abysses de Soi et la Théorie U d’Otto Scharmer[1]. Pour faciliter la compréhension, imaginons un U ou un chaudron, nous allons partir du bord sur la gauche à partir duquel on va descendre vers le creux, et cela correspond à la phase de déconstruction. Nous arrivons en bas de ce chaudron, au fond, pour toucher l'essence, la quintessence, la présence à Soi et la présence à plus grand que Soi. Évidemment, cela ne peut se faire que par un véritable lâcher-prise. Et la vie est très généreuse pour nous faire vivre des situations où nous sommes contraints de tout lâcher pour continuer, deuils, maladies, chômage, divorces, etc.
D’ailleurs, Jung a vécu des œuvres au noir extraordinaires qui l’ont amené à formaliser ses différents concepts. Les répétitions des difficultés nous conduisent à aller chercher toujours plus profondément ce qu'il y a au-delà des apparences, des personnages, des identités, des jeux de théâtre et donc de l'ego. Ce lâcher prise absolument fondamental va nous amener à une authenticité, une qualité d'être et de présence qui pose le terreau pour qu’advienne autre chose. C’est alors la remontée de la pente du chaudron, l’autre versant de la théorie U où nous faisons émerger quelque chose de nouveau, à tester puis à diffuser si cela fonctionne.
C’est ainsi également qu’un nouveau paradigme s’installe, après les balbutiements, c’est la mise en place d’un nouveau palier.
Et si tout était relié ? Les leçons du Tao
Il y a également un lien à faire avec le Tao car tous ces grands modèles reliés entre eux apportent une compréhension du monde et surtout de la période que nous traversons. On découvre la théorie quantique, on redécouvre le Tao, on parle de Jung, tous ces éléments-là ont des points communs, ils nous expliquent la complexité de notre époque, ils constituent un cadre théorique pour saisir l’évolution de nos conditions d’existence.
Qu'est-ce que nous apprend le Tao ? Il nous enseigne que la seule constante dans l’univers et la vie c’est le mouvement permanent. Il nous apprend à suivre le mouvement du vivant pour nous y adapter, non pas le contrôler mais laisser être, c’est aussi le lâcher-prise de l’égo. Dans la descente au creux du chaudron, dans l’alchimie ou la Théorie U, la découverte c’est la qualité de présence qui fera émerger quelque chose de nouveau. Relié et guidé par la Source chacun peut faire émerger autre chose. Lorsque tu évoquais l’Intelligence Collective, dans les organisations ou dans la société, c’est bien la volonté de faire émerger collectivement cette présence, qui va permettre, à plusieurs, de faire advenir ce nouveau paradigme, ce nouveau auquel nous aspirons, quelque chose d’inédit, fruit de l’intelligence du vivant. Tout est possible si nous posons les conditions pour que des êtres humains, ensemble, créent quelque chose.
France : Est-ce qu'on peut finir l’explication du processus alchimique ?
Christine : C'est ce que je voudrais faire en expliquant, comment passer de l'épure à titre individuel à l’épure collective. Pour y parvenir, nous avons besoin d’une cartographie pour saisir ce qui est en train de se jouer collectivement. Comment est-ce qu'on va savoir à quel niveau se placer pour avoir une vision « méta » et choisir les ingrédients pour la suite. J'aime bien l'éclairage de la Spirale Dynamique (modèle partagé en début d’article) qui nous permet de comprendre l’évolution de l’humanité. La Spirale Dynamique est le fruit des travaux de Claire Graves qui a cherché à montrer comment l'humanité passe par des étapes qui permettent de comprendre son évolution. A chaque étape de la complexité des sociétés humaines correspond un niveau d’existence qui a des caractéristiques propres, un peu comme un paradigme, un socle de normes, de valeurs, de comportements qui rendent cette époque homogène. Les évolutions majeures de notre société occidentale étant principalement technologiques et aussi économiques, politiques, sociales, l’humanité évolue progressivement vers toujours plus de complexité et à chaque palier l’être humain acquiert de nouvelles compétences cognitives, émotionnelles et sociales pour s’adapter. Ainsi, de la préhistoire à nos jours, on distingue huit étapes essentielles décrites ci-dessous[1] qui nous permettent de comprendre par exemple pourquoi les gens s’opposent aujourd’hui. Leurs valeurs et socle de référence sont différents et créent des « dissonances cognitives », « ça ne colle pas », on ne se comprend plus. Chacun définit le présent et le futur avec ses références propres. Et l’on retrouve ces différences dans les organisations. Certaines sont plutôt pyramidales et hiérarchiques et d’autres plus horizontales et coopératives.
Heureusement, l'être humain individuellement et collectivement détient les ressources pour assumer la complexité de notre monde. Ainsi, à l'échelle d'une organisation, d'une entreprise ou d'une équipe, cette spirale va permettre de mettre des mots sur les différences de besoins, de comportements, de définition de la performance, de la contribution, de la valeur, du pouvoir, etc. Cela facilite l’objectivation du degré de maturité des individus, des équipes et de la culture collective et permet d’identifier le chemin à parcourir pour progresser. Chacun peut alors réaliser l’évolution de sa conscience individuelle et contribuer à l’élévation collective.
Alors, pour passer d’une étape à la suivante, reprenant le processus alchimique, cela permet de comprendre de quoi a-t-on besoin comme épure collective pour parvenir, par exemple, à une gouvernance partagée et mature. Au niveau de notre société, nous n’y sommes pas encore. Nos gouvernants, dans leur majorité, ne privilégient pas forcément l'éthique du collectif et restent sur des intérêts particuliers et électoralistes. S’ils plaçaient le Bien Commun comme prioritaire, alors s’engageant dans un processus alchimique individuel ils pourraient amener le collectif à évoluer vers un niveau de plus grande maturité.
France : Et donc si on fait le rapprochement avec l'entreprise ?
Christine : Depuis cette gouvernance mature, en étant au service du public et du collectif, les critères de sélection pour opérer les meilleurs choix pour co-créer demain, seraient plus clairs à établir et mobiliseraient davantage de personnes dans un mouvement plus homogène d’évolution. Si nationalement cela paraît un peu compliqué, heureusement les entreprises sont là avec un périmètre plus restreint dans lequel elles peuvent expérimenter de nouvelles modalités de fonctionnement. Et elles sont nombreuses à innover.
Elles expérimentent notamment d'autres formes de gouvernance, partagées, organiques qui mobilisent l’ensemble des managers et aussi l’entreprise pour expérimenter la co-responsabilité. Ce qui consiste à décider ensemble du mode de prise de décision de l’entreprise, la répartition de la valeur et celle des pouvoirs et avec eux les modalités d’engagement et de responsabilité. Et, bien entendu, le travail individuel du dirigeant sur son ego fera toute la différence. Toutefois, et en mettant en lien avec la lecture que permet la Spirale Dynamique, l’essentiel est d’apprécier l’ADN de l’organisation, sa capacité à reconnaître sa maturité, clarifier vers où elle veut aller, établir sa raison d’être en lien avec son activité. En effet, cela n'a pas de sens de vouloir proposer la même organisation et la même gouvernance à tout le monde. Une fois ces bases établies, il est alors possible de parcourir la courbe du U et d’engager un processus alchimique pour progresser vers la mission de l’entreprise et faciliter l’implication de chacun.
France : Oui, on voit toutes les conditions nécessaires pour arriver à faire l'œuvre au blanc et notamment cela passe par la gouvernance. Nous avons bien parlé de l'œuvre au noir dont on peut dire qu’idéalement que l'on fait le ménage. Donc ensuite, quelles sont les épures ? Sur quels critères pour arriver à extraire quoi ?
Christine : Plus l’organisation fait ce travail et plus le personnel et le management se positionnent. Celles et ceux qui ne veulent pas de cette évolution s’en vont et d’autres arrivent, attirés par la lumière du rayonnement de l’organisation, qui, au-delà des biens et des services qu’elles créé et vend, apporte sens et congruence dans son fonctionnement.
Et ce n’est pas un hasard si de nombreuses organisations passent de l’unique quête de performance à vouloir véritablement fonctionner en mode coopératif[2], intégrer l’éthique dans leur pratique, le sens, modifier leur gouvernance. La montée de conscience des individus modifie les pratiques et les méthodes dans les entreprises.
Je reviens sur ta question. Quels sont les diamants que nous allons pouvoir extraire de notre humanité pour produire quelque chose d'une plus belle qualité ? Les conditions nécessaires seraient notamment une gouvernance planétaire éthique et responsable, on en est fort loin. C'est plus facile d’observer ce qui se fait dans les entreprises car elles sont concernées par le concret et les transformations aussi bien des conditions d’existence qui ont un impact direct sur elles que par le niveau de conscience des salariés qui les poussent à aller toujours plus loin. Le résultat de l’épure de l’œuvre au blanc sera alors l’émergence d’une conscience plus globale, spirituelle, au sens de la reliance et de l’interconnexion au vivant. Dirigeant comme managers et salariés prennent la mesure de cette conscience et veulent délibérément se libérer et aller plus loin.
Dans le modèle de civilisation précédent, la modernité, l’exemple passait par le haut dans un logique pyramidale et patriarcale[3]. Aujourd’hui, Internet puis les réseaux sociaux ont largement horizontalisé les échanges ce qui a une conséquence sur les rapports humains, le pouvoir et la distribution des rôles. C’est à ce niveau que des esquisses de gouvernance s'expérimentent. C’est le mode « bricolage », l’expérimentation, le Lab qui fonctionnent. Conscientes de ne pas avoir de modèle validé clé en main, même si des témoignages existent[4], les entrepreneurs avancent, essaient, devenant partenaires avec les acteurs qui les inspirent. Elles réalisent qu’il leur faut trouver un équilibre entre vertical et horizontal. Tout ne peux pas se décider avec tout le monde et l’exercice pyramidal du pouvoir doit se repenser.
Sur le bricolage comme mode de management :
Ce sont ces évolutions qui vont leur permettre d'aller vers l'œuvre au rouge, qui est le résultat du processus alchimique. L’aboutissement, nommé également Pierre Philosophale, fruit d’une transformation profonde, l’issue du processus alchimique consiste au moment où la personne passe de la prise de conscience spirituelle individuelle, œuvre au blanc à la conscience collective. C’est aussi l’étape où la personne lâche le besoin de « pouvoir sur » pour se mettre au service du collectif. C’est alors la révélation de la Puissance individuelle au service du Bien Commun qui facilite la conscience collective. Chacun se laisse agir par le vivant, ce que les Chinois nomment le wu-wei[5] et qui permet d’alterner les moments de volonté et d’action avec ceux où l’on se laisse « piloter » par plus grand que soi, ce qui nécessite un très grand lâcher-prise et une magnifique confiance dans les autres, notamment les coopérateurs de l’entreprise. Accepter que le résultat soit incertain, s’abandonner à la dynamique d’une intelligence collective au service du bien commun est assez contre-intuitif pour le monde des organisations.
Cela induit une modification substantielle du style de leadership puisque le leader prend conscience de sa Puissance et décide de la mettre au service dans une posture d'humilité afin, qu’au lieu d'être écrasante, par une supériorité imposée, elle permette la croissance des autres. Le leader régénéré favorise l’émergence et la manifestation des talents et des ressources de ses collègues et coopérateurs.
L’œuvre au rouge est la manifestation du phénix pour reprendre les termes alchimiques. Chacun renaît de ses cendres, les fruits des dissolutions de l’œuvre au noir, reprend ses composantes éparses, les recompose, les épure (œuvre au blanc), réveille sa conscience spirituelle pour révéler le meilleur de lui-même et manifester une puissance au service, l’œuvre au rouge. Et là encore le processus d’évolution individuel suit celui des conditions d’existence. La complexité de notre monde actuel nécessite que nous fonctionnions en mode coopératif et transdisciplinaire. Cette œuvre au rouge collective correspond en sociologie au paradigme émergent, que je nomme pour ma part, Néo-RenaiSens[6].
Nous manifestons les ressources qui sont latentes, en potentiel, en chacun de nous comme dans le collectif[7]. Ce processus initiatique individuel commence à se traduire au niveau collectif, notamment par les gouvernances d’organisations lorsque le leader veut véritablement apporter sa transformation au service du collectif. Ce sont aussi les modalités de fonctionnement inspirées du vivant : économie circulaire, symbiotique ou régénération, la perma-entreprise (permaculture appliquée aux orgnisations), la robustesse…
C’est en réalisant ce processus alchimique, en acceptant les transformations intérieures, parfois douloureuses comme le temps nécessaire de la transmutation du plomb en or que le dirigeant reviendra, auprès de ses équipes, profondément transformé et c’est cela qui va faire toute la différence.
Ce qui n'empêche pas de continuer à produire des biens et des services, de générer de la performance, du ROI, etc. Ce n’est pas antinomique, mais la démarche part d'un autre endroit et d’une autre temporalité. Le court et le moyen terme des exigences de performance de l’entreprise se marient avec le temps long de la vision à atteindre et l’acceptation de cette mue qui prend le temps de nos résistances intérieures.
France : J’entends qu’il est question d'avoir réalisé cette épure et d'avoir contacté cette présence à soi, au groupe et peut-être même à quelque chose de plus grand ça suffit pour remonter la pente du U, du chaudron, mais il semble que c'est que ne soit pas suffisant.
Christine : Comme mentionné plus haut le plus gros piège est celui de l’égo. Car si le processus alchimique a bien fonctionné mais qu’il y a détournement de la Puissance de vie alors c’est dommageable aussi bien pour le collectif comme pour le dirigeant.e. C’est ce que l’on nomme le piège de l’ego spirituel.
Je reviens à Jung, lorsqu’il a écrit son Livre Rouge où il raconte tous les éléments de son trajet intérieur, il nous offre son évolution qui va apporter au monde une voie pour se libérer de l’ego. Aujourd’hui, il en est de même de l’alchimie collective.
Pour le dirigeant, sorti de son œuvre au rouge, il va embarquer l'entreprise ailleurs et autrement et faciliter l’épanouissement des salariés en offrant les conditions de la transformation. Chacun y trouvant son compte, ce type de leadership va être encouragé. En revanche, si, il ou elle, s’accapare ce pouvoir, alors l’environnement va réagir également en le confrontant, en quittant l’organisation et en lui renvoyant l’impact de ses ombres.
Par exemple aujourd'hui beaucoup d'entreprises travaillent sur leur raison d'être, il n’est plus juste question de vision, il s’agit de quelque chose de plus incarné et spiritualisé. « Raison d'être » s’apparente à un registre lexical initialement assez éloigné de celui de l'entreprise. Donc, on spiritualise la matière[8]. Toutefois, le processus de transformation alchimique pour y parvenir est tellement exigeant que c'est normal que la matière résiste. Et quand je dis la matière, je parle de la matière des êtres humains. Et plus la transformation se rapproche de l’œuvre au rouge et plus certains se replient vers le plus sombre de leurs archaïsmes parce qu'ils n'ont pas envie de faire tout le travail intérieur.
France : En t'écoutant, j'entends aussi que le processus alchimique collectif passe nécessairement par un processus alchimique sur le plan individuel. Donc, il y a deux conditions que tu vas probablement pouvoir compléter puisque tu parlais justement de ce qu’il faut mettre en œuvre pour que cette alchimie se réalise. Il y a le développement individuel dans lequel chacun est invité à faire ce travail. Et puis, ce qui est extrêmement difficile souvent pour les organisations, c'est cette capacité à lâcher à un moment donné, c'est-à-dire à oser lâcher le contrôle.
Christine : Absolument. On peut voir dans notre quotidien les éléments de transformation individuels et collectifs. Par exemple, le développement personnel s'est invité dans les formations qui sont proposées aux entreprises depuis déjà plusieurs décennies. Rebaptisées, soft-skills, l’essentiel est de voir que cela se généralise. Cela ne veut pas dire que ça se démocratise toujours avec la profondeur associée, mais au moins il y a une connaissance des briques du processus. Avant que tout le monde ait réalisé son œuvre rouge, il y a des petits ratés et certains s'emparent des composantes du cheminement individuel sans faire tout le travail d'approfondissement. Mais au moins, il y a quelque chose qui se généralise ce qui est quand même une bonne nouvelle. Cela signifie que les ingrédients sont là.
D’ailleurs, si l’on porte un regard rétrospectif sur les derniers 25-30 ans, l’évolution est tout juste extraordinaire. Par exemple, prenons les méthodes de communication bienveillante Gordon ou CNV - qui permettent de revisiter nos rapports à autrui et d’apporter les clés vers des dialogues féconds, dépasser les violences, comprendre nos besoins profonds et savoir les exprimer- leur généralisation a explosé. Cela a dépassé la sphère personnelle et désormais les entreprises s'en emparent et font progresser leurs modalités de communication. Évidemment, comme mentionné précédemment avec l’œuvre au rouge, tout dépend de l'intention pour la mise en place de ces pratiques. Quelle est l’intention du dirigeant, de l’organisation, c’est pour d’atteindre quoi ?
La courbe du changement
Pour comprendre ce que nous vivons, nous pouvons nous appuyer sur la courbe du changement[1]. La pratique la plus répandue est de faire « plus de la même chose[2] » (changement de niveau 1 - Paul Wtazlawick et école de Palo-Alto) en cherchant à aller de A à B (cercles jaunes sur le dessin, Alpha, new-Alpha), en y allant tout droit, c’est-à-dire sans transformation effective. On reproduit alors les mêmes causes et on obtient les mêmes effets et donc on ne change pas vraiment. « J'ai un problème, je cherche la solution et je vais le faire avec mes ressources actuelles. Donc, je n'ai pas changé grand chose. »
Et là, c'est le biais des contraintes des entreprises (manque de temps, exigence de résultats, budget limité) qui vont demander à un problème x d’avoir une réponse immédiate. Ce que l'on peut comprendre par les pressions que vit l’organisation et le fait de devoir apporter des réponses assez rapidement et d’avoir une performance au trimestre ou au mois. L’entreprise a des salaires à payer à la fin du mois, elle ne peut pas attendre que les gens mettent trente ans à se transformer.
Cependant, si l’on ne prend pas le temps nécessaire à la transformation véritable, les investissements réalisés se perdent. Cela ne fonctionne pas ou en tout cas pas véritablement. Les réflexes reviennent. Alors comment concilier les paradoxes de la complexité ? Apporter une réponse rapide, une méthode simple à mettre en œuvre et le temps long et nécessaire de la transformation profonde ? Les entreprises matures, ou au moins leurs dirigeants, comprennent ces enjeux et savent mettre en place les conditions d’accompagnement au changement, sur 12 ou 18 mois. Ce qui signifie qu'il y a une prise de conscience du temps incompressible aux transformations de comportements. Le temps long est souvent lié aux résistances des acteurs à véritablement changer. Tant que cela résiste et qu’il y a des sabotages cela allonge le processus d’accompagnement. Néanmoins, tout ce qui est mis en place porte ses fruits, et si parfois le collectif entier ne s’est pas transformé, les graines germent et certains acteurs opèrent des mutations profondes et agissent différemment autour d’eux. Et c’est déjà un beau progrès.
Si l’on regarde la courbe du changement on observe qu’elle est similaire à celle de la Théorie U, elle représente un chaudron alchimique. Certaines organisations décident d’arpenter la troisième option de transformation, celle qui s’effectue plus en profondeur. Et c’est là que justement cette méthode est utile car elle permet d’introduire la dynamique alchimique sans la nommer et avec des pratiques et des étapes plus faciles à assimiler pour les organisations. L’essentiel va consister pour le dirigeant et la gouvernance qui pilotent l’entreprise de décider des conditions à mettre en place pour faciliter la manière d’accéder à cette qualité de présence individuelle et collective qui va faire toute la différence et respecter chacun dans sa volonté de transformation.
On revient au leader et à la manière dont il ou elle s'est transformé, a-t-il lui-même opéré ses transformations profondes ou est-il resté à la surface du changement ? C’est l’authenticité et l’implication de sa transmutation qui, par son rayonnement, va poser le chaudron qui va faciliter cette transformation collective. Il ou elle est modélisant précisément parce qu'il/elle est devenu, en congruence. L’incarnation de sa transmutation est alors inspirante, ce qui encourage chacun dans l’engagement dans la démarche. Le salarié réalise que s’il ose s’engager dans ce trajet intérieur alors de beaux fruits peuvent advenir.
Décider de manifester une éthique collective
France : C'est vraiment une invitation à accompagner les managers vers un leadership qui soit aussi bien à leur service qu’à celui de l’entreprise. C'est un travail personnel des managers.
Christine : Cela m’évoque à la question de l'anthropocène et de l'effondrement. A savoir que si nous restons sur la même trajectoire de croissance illimitée nous, l’humanité, prenons le risque de mourir. Rien d’original, puisque nous sommes mortels, mais là, comme pour la biodiversité, nous pourrions connaître une fin collective prochaine. Nous détenons les moyens de notre autodestruction notamment avec le nucléaire et les conflits armés qui ne demandent qu’à s’étendre. La question à se poser est alors : « Est-ce que nous nous laissons couler ou choisissons-nous de réagir ? »
Pour opérer un tournant radical, nous avons besoin de manifester une éthique collective qui prime sur nos désirs individuels et notre soif de pouvoir. Pour y parvenir nous devons développer lucidité et discernement sur nos comportements afin de les modifier. Notre époque nous contraint à une transformation intérieure individuelle et collective, radicale. Car si nous voulons que les choses changent il nous faut modifier notre niveau de conscience et donc entamer ce processus alchimique de profonde transmutation individuelle, d’abord, et collective, ensuite et ceci rapidement. C’est la transformation fondamentale de notre essence, de notre être, la modification de notre paradigme intérieur qui fera advenir le paradigme / conditions d’existence nécessaire à l’époque que nous vivons.
Ce qui passe par une connaissance fine de nos ombres individuelles et collectives afin de réaliser l’œuvre au noir et faire advenir notre lumière au service du collectif.
La traversée des ombres
Dans la courbe du dessin précédent nous voyons que pour opérer un changement réel, significatif, qui ne reproduit pas le changement de niveau 1 mais peut véritablement amener quelque chose de différent, il nous faut descendre dans le creux « gamma » et cette descente « aux enfers » est évitée par la majorité d’entre nous car nous craignons de souffrir et surtout nous pensons que nous pourrirons rester « coincés » dans les abysses. Ceci est une représentation erronée du réel. Car, à part quelques exceptions qui sombrent dans une dépression chronique, le passage par le tréfonds de nos ombres est un puissant révélateur de notre résilience. Nous touchons le terreau fertile de notre terre noire[1] afin de manifester le limon fécond de nouvelles ressources. Comme un rebond, un regain de vitalité.
Ce qui était auparavant cantonné dans la sphère privée et laissé au libre-arbitre de chacun, à savoir décider de travailler sur soi pour sortir de nos névroses, devient un impératif collectif. A l’instar de l’impératif catégorique de Kant, cette condition de mutation collective devient obligatoire pour faire face aux enjeux de notre temps et manifester le paradigme émergent, essentiel pour modifier significativement nos comportements et traverser les crises.
La récente actualité politique démontre de notre capacité à créer du chaos face à la complexité.[2] Les réponses passent soit par de conservatismes en votant pour des candidats qui manifestent des axes de régression soit une volonté progressiste qui doit néanmoins s’occuper de ses ombres afin que ses orientations de libération ne soient pas vécues comme des tendances extrémismes et violentes à leur tour.
Le temps nécessaire à la transformation
Ce qui prend du temps, ce qui va à l’encontre des standards organisationnels qui cherchent à aller toujours plus vite. Cette précipitation conduit immanquablement à faire toujours “plus de la même chos”e, car la mise en place des pseudo changements conduit à des pertes de temps, manque de concertation, de prise de décision partagée, projets qui s’éternisent pour des raisons de pouvoirs, etc. L’utilisation du temps n’est pas faite à bon escient. La langue anglaise a cette distinction entre efficient et effective pour parler d’efficacité. Le changement qui produit « plus de la même chose » est la recherche d’efficacité, effective, ce sont les modifications rapides et non réellement transformatrices. Tandis que pour opérer des changements significatifs, il est nécessaire d’utiliser du temps de préparation et notamment pour la mobilisation des acteurs afin qu’ensuite la mise en place soit rapide et engage tout le monde car d’accord pour la mise en œuvre. Et c’est alors l’efficacité au sens effectiveness. Ce qui implique la modification de nos représentations sur le réel aussi bien de l’efficacité que tu temps.
La théorie U ou le processus alchimique mettent l’accent sur le temps long à passer dans la déconstruction des croyances, habitudes, ombres qui conduisent aux répétitions de comportements. Si ce temps est réellement effectué alors l’entrée dans l’étape de présence individuelle puis collective se fait en qualité et donc en efficacité. La remontée du U, du chaudron sera d’autant plus puissante et effective qu’elle sera dotée de la puissance de la libération. La créativité et les innovations sont alors riches et précieuses car le fruit, concerté et incarné des individus qui y ont participé. Cette descente dans les profondeurs du creux « gamma » permet la remontée de la fertilité du terreau intérieur et apporte la force de la transformation. Il s’agit de puiser dans les profondeurs les ressources de la résilience.
La dynamique de la vie
France : En guise de conclusion : peut-être veux-tu ajouter quelque chose?
Christine : Nous avons déjà évoqué le wu-wei et il est essentiel de le comprendre pour réussir une transformation en profondeur des individus et des collectifs. Il y a un temps pour agir, définir la vision, la raison d’être, la stratégie, le fait de mobiliser les forces, les acteurs et les ressources et un temps pour laisser agir ce qui a été semé. Et cette notion, issue de la culture taoïste, nous est totalement étrangère voir opposée à nos représentations occidentales du réel. Nous voyons la performance comme un mouvement linéaire, infini d’actions. Nous avons tellement oublié les lois du vivant que nous nous sommes coupés de ses enseignements, de sa force et de sa dynamique. Il y a un temps pour préparer la terre, remuer les sols, féconder le terreau, semer les graines ET un temps où on laisse le sol agir, la graine germer et les pousses éclore. C’est cela le wu-wei, « laisser agir au bon moment et le temps nécessaire ». D’ailleurs un proverbe chinois dit : « il ne sert à rien de tirer sur les radis pour les faire pousser plus vite ». Dépourvus de cette sagesse issue de l’observation de l’agriculture, nous nous sommes calés sur la logique numérique des bits qui impulsent, en continu, des informations et impriment sur les humains le rythme des données véhiculées par l’électricité.
Ainsi, pour opérer des transformations fondamentales, celles conditionnant un véritable changement de paradigme nous avons besoin de revenir aux lois fondamentales de la vie : suivre les processus alchimiques de transformation, comme le font les arbres qui vont puiser dans la terre, l’hiver, les substrats pour résister au froid et faire remonter à la surface, au printemps, une sève régénérée. Réapprendre le rythme agir/ non-agir, comme la dynamique de la respiration un temps pour l’inspir et un temps pour l’expir, retrouver les propriétés du temps, celui des préparations de qualité, relativement long, puis le temps court délié de l’action efficace. Accepter de réaliser le travail alchimique individuel puis collectif de la rencontre avec nos ombres, nous départir de nos besoins de « pouvoir sur » pour libérer la Puissance « au service ». Faire grandir nos capacités cognitives, émotionnelles et sociales pour appréhender la complexité dont nous sommes contemporains et dont nous avons en nous toutes les ressources qu’il suffit d’entraîner. Vérifier que nous ne reproduisons pas encore des ersatz de changements qui sont en fait des travestissements du « plus de la même chose » pour parvenir à des transformations réelles et effectives. Le wu-wei consiste dans l’équilibre juste de l’agir et du laisser agir. Cette capacité à saisir la justesse de l’action s’accompagne de discernement. Toutefois, celui-ci s'acquiert si j'écoute la vie me traverser et non pas si j'écoute ma seule volonté qui veut contrôler le vivant.
Enfin, fruit du processus alchimique consiste dans le fait d’accepter d’être agi par le vivant car guidé par le Soi, cette connexion à plus grand que soi, à la Source est un long processus de déconstruction de nos valeurs, représentations du réel et convictions sur notre omnipotence. Réincorporer toutes les dimensions du vivant, de manière globale et holistique afin d’appréhender le réel dans sa complexité et pouvoir composer avec nous amène à revenir à cette humilité du débutant. Car pour accepter d’être agi par plus grand que soi, cela implique de reconnaître que nous sommes une petite partie du vivant. Si j’arrête de résister à ce que la vie me propose, alors les transformations vont très vite.
C’est à tout cela que nous sommes conviés si nous voulons réussir les transmutations de notre civilisation.
La présence s’expérimente dans le silence
France : Cela veut dire s’offrir des moments d'écoute, c’est-à-dire des moments de silence ?
Christine : Oui le silence fécond des moments de retraite pour écouter bruisser le vivant en soi et autour de soi. Il permettra de parvenir à une autre manière de voir les choses. Le fait qu'on regarde notre lien avec le vivant et qu'on se mette dans cette observation et cette écoute va faciliter le développement d’un certain type de connexion. Ce sont ces connexions-là qui vont nous conduire à ressentir l'interdépendance et aussi l'humilité. Elles vont m'apprendre à écouter, et je vais ainsi comprendre avec plus de discernement quand je dois agir et quand je dois laisser-faire et laisser-être.
C'est une invitation, notamment pour les organisations, à développer cette compétence de conscience de l'interdépendance, dans et au-delà de leur écosystème. Cela permet de revisiter le contenu de son offre, la valeur à partager, les impacts des actions sur le territoire et les différents acteurs.
En prenant de la hauteur, en regardant de manière globale la réalité nous reprenons conscience de notre petite part dans le vivant, de l'interdépendance. Rappelons-nous le règne végétal, cela commence d'abord par des racines qui sont interreliées, qui créent un mycélium dans lequel chacun contribue en don contre don et c'est parce qu'il y a ces racines qu'alors l'arbre pousse et qu'il peut ensuite produire des branches et des fruits etc. Tandis que nous, humains, nous avons des comportements hors sol. Prenons un exemple, d’un côté on va mettre hors des entreprises les seniors – de plus en plus tôt- et de l’autre, on valorise que les jeunes tout en se pâmant sur les apports des peuples premiers qui justement valorisent la transmission et la valeur des apports des anciens !
Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre. Winston Churchill
Complexité et coopération
C’est dans cette conscience de l’interconnexion qu’émergent les pratiques de coopération. Pourquoi ? Pour comprendre et résoudre la complexité dans laquelle nous vivons nous avons besoin de transdisciplinarité qui nécessite l'interdépendance des compétences et des personnes.
France : Alors justement la coopération c'est aussi un des sujets que j'avais envie d'ouvrir avec toi puisque c'est une de tes spécialités. Est-ce que tu peux justement nous définir déjà qu'est-ce que c'est coopérer pour être sûr d'être au même endroit et ensuite quelles sont ces conditions à réunir pour être en capacité de coopérer ?
Intelligence collective : https://www.souffledor.fr/intelligence-collective/1227-intelligence-collective-l--9782364290525.html
Christine : Coopérer c’est la capacité de co-créer, à plusieurs intelligences, pour produire, ensemble, idées et innovations qui transcendent les capacités individuelles de chacun. Pour y parvenir, cela repose notamment sur le principe d’équivalence d'humanité. Cela signifie reconnaître la singularité et les talents de chacun comme ayant une valeur équivalente aux miens, nous ne sommes pas égaux mais nous pouvons coopérer sur des bases d’équivalence. Ce qui induit le respect de chacun et pose les conditions de sécurité et de confiance essentielles pour oser dire et faire avec l’autre, sans crainte de jugement de « prédation » de ses apports.
Poser les conditions de la coopération c’est ordonnancer des séquences nécessaires comme briques essentielles pour co-créer de l’Intelligence Collective. C’est aussi suivre les guidances du vivant qui est notre plus grand enseignant de coopération. Cela commence par inverser le rapport au temps. L’attention est portée sur les racines, c’est-à-dire que l’on va passer du temps à soigner le lien et la relation en créant des occasions de rencontre durant lesquelles les personnes peuvent se dévoiler. Cette authenticité partagée facilite la qualité des partages et développe la présence dont nous avions vu combien elle était essentielle pour faire advenir quelque chose de nouveau. C’est aussi la rencontre de l’altérité et l’opportunité de savoir tisser ensemble en magnifiant talents et ressources. C’est en comprenant ce que nous avons en commun et nos différences que s’ouvre l'appétit de converger et de co-créer. Ce temps partagé à tisser les conditions de notre coopération va permettre de libérer le temps court de l’action efficace et laisser advenir des résultats inattendus et souvent surprenants.
Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes Tisserands, c'est-à-dire de ceux qui œuvrent aujourd'hui à réparer tel ou tel pièce du grand tissu déchiré du monde. Abdennour Bidar
En conclusion
C’est là que se rejoignent les modèles, le processus alchimique nous permet de nous défaire de nos ombres individuelles et collectives et faire advenir la quintessence de Soi au service du Bien Commun, la Théorie U est un des modèles qui permet sa mise en pratique ; la qualité de présence et le lâcher-prise comme le wu-wei nous font expérimenter les lois du vivant, pour réussir ensemble à coopérer et à relever les défis de notre époque.
Christine Marsan, 27 juin 2024, Mis à jour 30 mai 2025.
[1] Nom initial de l’alchimie : qui vient du mot égyptien kem, qui désignait la terre noire limoneuse et fertile (donc agent de transformation) résultant des crues du Nil et, par extension, l'Égypte elle-même.
[2] Décision de dissoudre l’Assemblée Nationale par Emmanuel Macron.
[1] https://bloculus.com/le-changement-c-est-lentement/ ; Image, modèle Value Mach.
[2] Changement de niveau 1 pour Paul Watzlawick.
[1] https://intelligencecollectiveconsciente.wordpress.com/2018/06/25/spirale-dynamique/
[2] Passage du niveau orange à vert dans la Spirale Dynamique.
[3] Niveaux bleu et orange de la Spirale Dynamique.
[4] Frédéric Laloux, Reinventing organisations, Diateno, 2016 : https://www.diateino.com/reinventing-organizations-p-8473.html
[5] https://fr.wikipedia.org/wiki/Wuwei_(philosophie_chinoise)
[6] https://up-magazine.info/societe/solidarites/1977-le-feuilleton-de-la-mutation-les-similitudes-avec-notre-epoques/ ; https://www.societefrancaisedeprospective.fr/entrer-dans-un-monde-de-cooperation-de-christine-marsan/
https://www.linkedin.com/pulse/nous-avons-une-responsabilité-soutenir-la-renaisens-christine-marsan/
[7] C’est le passage de vert à jaune, montée en compétences dans le « pilotage » de la complexité.
[8] Le processus alchimique vise d’abord à spiritualiser la matière, puis à l’issue de la transformation à matérialiser la spiritualité.
[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Théorie_U
[1] Daimon, résumé par guide intérieur : « Le sens soutenu par Pierre Vesperini, dans sa biographie de Marc Aurèle note que Marc Aurèle utilise parfois le mot daimôn comme synonyme de Raison mais qu’il distingue aussi très souvent les deux termes. L’empereur philosophe explique ainsi que le daimôn reste avec nous après la mort (VIII,45) à ou encore que la Raison doit accomplir les ordres du daimôn (V,27). Dans ce sens, le daimôn n’est pas une métaphore de la Raison mais un dieu logé dans notre poitrine (III,16) à qui il faut rendre un culte. »
[1] https://www.france.tv/slash/mascus-les-hommes-qui-detestent-les-femmes/
[1] https://www.cairn.info/l-imaginaire-dans-la-clinique--9782749267128-page145.htm#:~:text=L'imagination%20et%20l'imaginaire,la%20société%20sur%20l'individu.
[1] « La « postmodernité » est un mot flou. Il n’est pas la modernité, mais il n’est pas encore une autre époque. Il est cet entre-deux riche en crises. Plus exactement, il est le nom temporaire d’une époque qui n’a pas encore trouver son nom propre, de même que l’époque « moderne » était qualifiée de « postmédiévalité » avant que Charles Baudelaire lui attribue l’épithète qui nous est familier. » Michel Maffesoli. https://www.revuedesdeuxmondes.fr/penser-postmodernite-selon-michel-maffesoli/ ; https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Condition_postmoderne
[1] Les paradigmes sont, selon le philosophe des sciences Thomas Samuel Kuhn des « découvertes scientifiques universellement reconnues qui, pour un temps, fournissent à un groupe de chercheurs des problèmes types et des solutions ». Un paradigme peut être infléchi ou totalement remis en cause s'il remplit un certain nombre de conditions expérimentales ou d'insertion dans un nouveau paradigme. Les révolutions scientifiquesentraînent des changements de paradigme qui exigent du temps pour pénétrer la communauté scientifique, car le nouveau modèle proposé doit vaincre les obstacles épistémologiques et être assez robuste pour remettre en cause le précédent. La « vérité scientifique » à un instant donné ne peut représenter qu'un consensus temporaire au sein de cette communauté, les paradigmes étant fluctuants, en particulier dans les sciences humaines et sociales, notamment économiques (Kuhn 1962, p. 172). Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paradigme
[2] Entrer dans un monde de coopération, une néo-RenaiSens : https://www.chroniquesociale.com/comprendre-la-societe/691-entrer-dans-un-monde-de-cooperation.html
[3] Le processus alchimique a pour objectif, au sens physique, chimique, comme psychologique et spirituel de transformer le plomb en or, c’est-à-dire à dégrossir les vils métaux pour les transformer en métaux nobles. Il consiste en trois grandes étapes dites Œuvres au noir, au blanc et au rouge. Carl G. Jung a associé les processus alchimiques avec l'évolution intérieure du moi vers le Soi. Toutes les notions sont alors à utiliser au sens symbolique pour la transmutation intérieure.
[1] https://www.chroniquesociale.com/comprendre-la-societe/604-s-approprier-les-cles-de-la-mutation.html
[1] https://www.podcastics.com/podcast/episode/25-sinspirer-du-processus-alchimique-pour-se-transformer-christine-marsan-psychosociologue-coach-facilitatrice-de-mutations-et-auteur-209245/